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sans-maitre

Retour de lecture de " Le périple des hommes amoureux" de Jean Zaganiaris

4 Avril 2018 , Rédigé par Soumia Mejtia

Un périple ou un retour en parole ou un besoin de coucher ces épisodes mis en écheveau pour mettre de l’ordre, pour apprendre des douleurs ou juste les accepter. L’histoire est une sorte de tourbillon ou d’éboulement qui tourne autour de plusieurs personnages, communiquant entre eux par un même canal : le langage de l’amour. Ce qui crée une polyphonie déconcertante qui n’est qu’un leurre multipliant ainsi les actions. Une seule trame pourtant les unit : le périple des hommes amoureux.

A croire que seuls les hommes sont en phase de faire le périple de l’amour, mais le voyage se fait à deux. Les couples s’accroissent pour ne se centrer que sur un seul où le héros parle dans le leitmotiv de la perte et  du don de soi : « Mais cette séparation avait tué quelque chose en moi » p.10, «  elle est partie et quelque chose est aussi en train de partir » p.15 «  J’ai senti quelque chose se briser en moi. » p.82 «  on est tous en train de se consumer dans cette vie »p.53.

L’amour y est chanté, brisé, consumé, soutenu, pourchassé, répugné… : «  Vous l’avez remarqué, nous parlons souvent des mêmes conneries, de ce drôle de mystère qu’est l’amour et des indignations qu’il peut provoquer. » p.95

J’ai pu un moment ou à plusieurs sentir la douleur et l’inverse de la douleur du héros, je ne suis pas différente, je m’y suis projeté dans cette mémoire affective chargée d’histoire et de souvenirs attachés forcément à des lieux précis : café, parc, bar, salon… Dans périple des hommes amoureux, les lieux ne se ressemblent pas comme ces instants vécus dans ces lieux. Il n’y a pas un lien commun pour l’amour, il y a un moment pour l’amour et le lieu importe peu, il s’agit d’une rencontre dans un espace-temps, une présence, une dimension singulière qui s’ouvre quand l’être chéri est présent : «  Comme une métamorphose quelque chose qui détruit tout. La souffrance qui le ronge semble s’être envolée. Il apprécie cette sensation d’apaisement. Il aime c qui est en train de mourir en lui. »p.93

Le vrai lieu est temporel, l’amour s’installe  dans l’incertitude, dans l’hésitation, dans le tourment, dans l’inconnu : «  J’aime ces voies qui nous perdent dans des lumières translucides. » p.52

L’amour c’est se perdre, dans le plaisir oral, émotionnel, physique … : «  son regard triste me bouleversait. » p. 86 « Il ressent juste une sensation curieuse dans la poitrine, quelque chose qui ressemble vaguement à de la joie. » p.89 «  le visage de la femme que j’aimais traînait dans ma tête comme un pendentif autour du cou. » p.91

Habiter l’amour, est ce juste ? Ou l’amour est-il habitable ? Ou se fait-il dans l’immanence ? Il y a des amours que l’on n’oublie jamais, nous en sommes habités au point de chercher à s’y incarner par une sorte de réminiscence comme il est question dans Périple des hommes amoureux.

Pouvons-nous dire qu’il s’agit d’une réinvention de l’amour dans une expression métaphorique qui nous happe et nous dérange même ?

Je m’imaginais le héros, je le suis d’ailleurs, j’ai été dans cette hospitalité de la transposition confortable pour sentir cet amour qui nous enchante et nous épuise. Dans cette recherche continuelle de cet autre, cette altérité qui se recrée en nous par le regard que nous lui portons, dans tous les espoirs que nous y mettons, dans le prévisible et l’imprévisible, dans les moments de trouble et dans les autres où nous tremblons, ce chemin ou ce périple est essentiellement le nôtre nous affirme Jean Zaga dans Périple des hommes amoureux : «  En dehors de certaines émotions sublimes, il n’y avait rien à gagner et rien à perdre ici-bas. Le but était de se lever le matin et se coucher le soir, si possible avec le sourire. » p.8

Bref, j’ai beaucoup aimé lire ce livre, à aucun stade mon envie de lire ne s’est émoussée. J’avais accès aux sentiments et ressentiments émis dans une langue magnifiquement produite. Beaucoup de force s’en dégage dans une facilité d’expression fine et subtile. J’ai eu des vertiges au début,  attisés par une absence de centre héroïque, mais je m’étais saisie que le héros n’était qu’un seul,  éparpillé  dans plusieurs histoires.

 

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